2025 le zéro phyto ???

Pour un terrain de sport engazonné 2025 c'est déjà demain. La loi Labbé, qui aujourd'hui restreint l'utilisation des produits phytosanitaires, devrait s'appliquer au golf en 2025.

Concrètement, qu’est-ce que cela signifie pour nos golfs?

Actuellement, les golfs peuvent utiliser en cas de besoin reconnu et dans un cadre professionnel strict, des produits de contrôle pour maintenir les surfaces praticable :

  • herbicides
  • fongicides
  • insecticides

Demain, ces produits seront interdits à l'utilisation.

Comment gérer cette situation.

Depuis déjà des années  les intendants de golf en France cherchent à faire évoluer leurs méthodes de travail dans le but de diminuer au maximum l'utilisation de ces produits. 

"Nous travaillons avec la nature et non contre la nature".

L'intendant doit travailler avec deux extrêmes opposés :

  • Les joueurs qui demandent une surface de qualité du 1er janvier au 31 décembre et ceci sans se soucier des conditions climatiques. Le but est d'avoir toujours une tenue de ligne parfaite, une vitesse de balle digne des retransmissions télévisuelles et une couleur du gazon vert++.
  • Le végétal, quant à lui, demande à pouvoir faire sa photosynthèse pour transformer les éléments nutritifs en énergie, pour son développement et sa résistance aux pathogènes et adventices en saison, et ensuite en période dite de dormance, rester le plus possible à l’abri des blessures qui sont favorables aux entrées de maladies cryptogamiques

Aujourd'hui, je me base sur différentes stratégies pour pallier aux problèmes:
  1. la lumière et la ventilation
  2. une fertilisation contrôlée
  3. un arrosage contrôlé
  4. des opérations mécaniques 
  5.  les méthodes alternatives d'aujourd'hui et de demain
la lumière et la ventilation

Le premier point, à mon sens, est de permettre aux graminées en place de se développer, pour cela il lui faut deux éléments naturels et gratuits.
  • L’énergie du soleil, qui, une fois captée par la plante, va enclencher tout un système de production d'énergie, grâce à la photosynthèse. Plus l'intensité lumineuse est importante, plus la plante sera capable de résister aux attaques cryptogamiques.
  • La ventilation, ceci est un point moins connu, mais tout aussi important. Une zone où les circulations d'air sont bloquées ou déviées par des obstacles (arbres, mur, zone enclavée au bas de pentes ...) va, en été, créer des zones en surchauffe et en hiver des zones en permanence humides. Ces deux cas vont affaiblir les graminées en place et favoriser le développement des pathogènes.
Simple, laissons passer l'air et la lumière à proximité des zones engazonnées... Oui pour de nouvelles constructions réfléchies, mais plus compliqué sur des sites qui ont été construits il y a plus de trente ans. Dans ce cas, beaucoup de végétations se sont développées, les forêts ont muri sur les abords, l’ombre et le manque de ventilation ont gagné de la surface. Jusqu'à maintenant nous avions quelques solutions, mais demain ? 
ombre portée en fond de green
Une fertilisation contrôlée

Cette année, j'ai mis en place deux gestions différentes pour la lutte contre les maladies de gazon :
  1. Une fertilisation dite élicitrice à base de phosphite
  2. Une fertilisation NPK et oligo-éléments basée sur les températures mis tous les 7 jours.
Aucune de ces deux solutions ne m'a permis de contrôler le développement des maladies sur l'année, mais j'ai pu observer sur une année une réduction de l'impact qu'il faudra retrouver l'an prochain pour valider le processus.

La fertilisation à base de phosphite n'a eu à mon sens aucun résultat sur le dollar spot, car les apports étaient trop espacés, la maladie a gagné rapidement du terrain sans que les gazons n'arrivent à lutter de manière efficace.
A contrario sur la fusariose, j’ai pu observer une diminution de la gravité de l'attaque de fin de saison hivernale, les tâches étaient nombreuses, mais de tailles réduites comparé à la fertilisation standard.

fusariose froide

La fertilisation NPK mise en place chaque semaine a eu un démarrage plus lent que la fertilisation à base de phosphite. Cependant, le résultat en saison fut meilleur sur le point de vue sanitaire. Le dollar spot a eu du mal à prendre le dessus sur les graminées en place, le développement de l'agrostide a été également (visuellement) bien meilleur à ma grande surprise, le pâturin me semble avoir perdu en intensité sur les zones gérées par cette fertilisation régulière basée sur les températures du site.

dollar spot
Un arrosage contrôlé
Concernant la gestion de l'arrosage  du site, je vous renvoie sur un autre article.
Cependant, l'arrosage reste pour moi un point primordial pour la diminution des intrants fongique et herbicide. Un sur ou sous arrosage va créer des problèmes :
  • asphyxie
  • maladie
  • invasion d'adventices (pâturin annuel)
  • invasion de mousses
Pour cela à ma connaissance nous possédons différents matériels, le plus précis est portatif ce qui demande un temps de travail énorme. Je me demande si un jour, comme pour l'agriculture, nous pourrions utiliser des drones pour la détection des zones de stress causé principalement par le manque d'eau. 
Ce type d'appareil permettrait d'avoir une vision complète du terrain (green, fairway et départ) et de définir avec exactitude quelles zones arroser. Pour cela, il faudrait que nous puissions envoyer nos données le matin et recevoir l'information dans l'heure, je ne sais pas si cela est actuellement possible.
Une fois la carte récupérée, il ne nous resterait plus qu'à vérifier les points à risque, et non toute la surface des greens (par exemple), pour effectuer les appoints d'arrosage manuel. 
imagerie de drone sur les zones humides / sèches
Des opérations mécaniques

Encore une clef de la réussite, mais certainement la plus compliquée à mettre en place. Les opérations mécaniques sont vues encore aujourd'hui comme un fardeau par nos joueurs.
Sans les opérations mécaniques, nous ne pouvons pas y arriver. Le but de ces opérations est principalement de limiter l'humidité de surface et donc limiter la prolifération des champignons.
L'effet collatéral à court terme est l'amélioration de la qualité de jeu.
  • Le sablage, comme expliqué dans un autre post, cette opération permet de diluer la matière ce qui évite l’effet d'éponge (retenue d'eau en surface), dans le même temps cette opération va durcir la surface et la rendre plus linéaire, permettant aux joueurs de créer des effets à l'attaque des greens et également elle participera dans un second temps à l'amélioration de la ligne de putt.
  • Les tontes verticales (verticut, défeutreur...), le but est d'extraire des matières rétentrices d'eau (feutres, algues, mousse...), ces opérations permettent également d'extraire toutes les graminées faibles donc sensibles aux maladies et, pour finir, la tonte verticale relève les brins du tapis végétal permettant dans les jours qui suivent une amélioration nette de la roule des greens.
  • Les aérations (pointes pleines ou carottage) et les décompactions (air, eau ou broche), cette opération n'a pas d'intérêt direct sur le jeu, c'est même dans la majorité des cas le contraire, cependant elle est indispensable pour le bon développement des graminées en place. Le but est d'accélérer les échanges gazeux entre l'atmosphère et le sol. Un sol sain donnera un gazon sain et des conditions de jeu optimales.
carottage rempli de matériaux drainants.
Les méthodes alternatives d'aujourd'hui et de demain

Il y a encore deux méthodes, à mon sens, pour limiter le développement des pathogènes :
  • Le sur semis ou inversion de flore,  déjà pratiqué par de nombreux collègues. Cette opération permet de mettre en place par petites touches des espèces de graminées de dernière génération. Ces espèces sont plus résistantes aux agressions extérieures, les rendant donc plus résistantes aux différentes maladies. Cette opération incolore dans la majorité des cas reste compliquée à mettre en place. Contrairement à un semis classique où nous laissons s'implanter la plante tranquillement, nous mettons ces jeunes plantules en combat direct avec des graminées déjà installées et agressives, de plus nous n'arrêtons pas l'entretien intensif sur ces surfaces rendant l’implantation très aléatoire.
  • La luminothérapie, présentée il y a peu sur le golf par la société teamgreen light, cette technologie "permettrait de limiter" le développement de la sporulation des champignons ciblés. Nous ne parlons pas de nettoyage des sols par rayons UV qui pourrait créer plus de problèmes que de bénéfices, mais bel et bien de contrôle. Encore une fois, cela l’imitera les dégâts visuels des champignons.
robot de luminothérapie
Conclusion
Actuellement, je n'ai pas de solution miracle pour lutter efficacement et promettre un terrain indemne de toutes maladies et adventices sur plus ou moins long terme.
Toutes les opérations, les contrôles mis en place diminuent l'impact des pathogènes, mais en aucun cas n'arrivent à les supprimer.
Pour le moment, je vois 2025 comme un objectif idéaliste sur le papier, mais qui aura de lourdes conséquences économiques dans le milieu des terrains de sport.
Nous allons augmenter nos dépenses (main d'œuvres, semences, engrais, sables, parc matériel ...), pour un résultat qui dans tous les cas sera moins bien qu'aujourd'hui.

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